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Orage magnétique

http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9t%C3%A9orologie_de_l'espace

Le Soleil n’est pas l’astre immuable qu’on croit. Comme de nombreuses étoiles, il possède une activité cyclique (le cycle solaire) dont la périodicité est de 11 ans environ et une variation de son activité à long terme au cours des siècles. Par exemple, pendant le minimum de Maunder, il n'y avait plus de taches solaires (voir la courbe de droite en rouge).

Pendant les périodes d’activité maximum, le nombre de taches solaires est plus élevé et il se produit davantage d’éruptions solaires. Une telle éruption peut, en quelques minutes, libérer l'équivalence énergétique d'un mois de production humaine. Le surcroît d’activité solaire se traduit aussi par l’éjection dans l’espace de grandes quantités de matière. Les éruptions sont accompagnées de rayonnements intenses dans l’ultraviolet, en rayons X et en ondes radio. Enfin, le Soleil peut émettre des faisceaux de particules (protons, électrons…) de haute énergie. Quand de telles perturbations sont dirigées vers la Terre, elles viennent perturber l’environnement terrestre entier dans les minutes ou les heures qui suivent leur émission. Toutes les couches de notre environnement terrestre sont concernées : depuis la magnétosphère (la cavité magnétique qui entoure la Terre à plus de 1000 km d’altitude), l’ionosphère (la couche conductrice située entre 100 et 1000 km environ, et qui joue un rôle essentiel dans la transmissions des ondes radio), à l’atmosphère neutre (moins de 100 km), et jusque dans la lithosphère.

Mécanismes physiques

La météorologie de l’espace est une science complexe, qui fait intervenir un grand nombre de mécanismes physiques. Presque tout part du Soleil, mais les conditions du milieu spatial sont aussi influencées par le rayonnement cosmique, d’origine extra-solaire.

Il y a trois principaux vecteurs par lesquels le Soleil peut affecter le milieu spatial :

  1. en émettant du rayonnement électromagnétique. Le Soleil émet des ondes électromagnétiques sur une large plage de longueurs d’onde allant des ondes radio jusqu’aux rayons X et même aux rayons gamma. L’intensité est cependant la plus forte dans les longueurs d’onde correspondant à la lumière visible, où elle suit de près la loi du corps noir. La variabilité de la radiation solaire est très faible dans le domaine visible. On observe moins de 0,5% de variation relative sur un cycle solaire. Elle croît ensuite rapidement quand on s’approche des petites longueurs d’onde, dépassant 100% en dessous de 120 nm et même 1 000% en dessous de 30 nm. Les éruptions solaires se manifestent en effet par une intensification rapide du rayonnement dans la gamme des rayons ultra-violets et X, mais aussi en ondes radio. Ces ondes électromagnétiques mettent 8 minutes pour atteindre la Terre, où elles sont en grande partie absorbées par les hautes couches atmosphériques et plus particulièrement par l’ionosphère, qui s’en trouve ainsi modifiée. Or l’ionosphère joue un rôle particulier dans la propagation des ondes radio, et influence aussi l’état des couches inférieures (stratosphère).
    Flux de protons de haute énergie mesurés par le satellite GOES. Le flux est mesuré pour des protons de plus de 10 MeV, 50 MeV et 100 MeV.
  2. en émettant des particules de grande énergie. Les éruptions solaires ont généralement pour effet d’accélérer des particules élémentaires chargées (protons, électrons, noyaux d’hélium…) jusqu’à de hautes énergies, pouvant aisément dépasser 1 MeV. Ces particules se propagent ensuite dans l’espace interplanétaire, en suivant les lignes de champ magnétique. Elles sont parfois accélérées davantage par la traversée d’ondes de choc. Ces particules mettent 30 minutes à 1 heure pour atteindre la Terre. Elles ne pénètrent heureusement guère à l’intérieur de la magnétosphère car le champ magnétique terrestre les dévie et fait ainsi office de blindage. Seules les éruptions les plus violentes peuvent être détectées au niveau du sol (surtout à haute latitude) par l’arrivée de neutrons issus de réactions nucléaires dans l’atmosphère. Il s’agit de Ground Level Enhancements (GLE), dont un des plus puissants s’est produit le 20 janvier 2005. L’image de droite illustre l’augmentation du flux de protons observée lors d’une autre éruption violente, qui s’est produite le 2 novembre 2003. Comme l’échelle verticale est logarithmique, le flux augmente d’un facteur 100 à 1 000 pendant l’éruption. Des telles éruptions sont plus fréquentes pendant les périodes de forte activité solaire et peu après. La dernière période de forte activité s’étendait de 2000 à 2004 environ. Des particules de haute énergie se rencontrent aussi dans les ceintures de rayonnement (ceintures de radiation, ou encore ceintures de Van Allen), une région annulaire qui entoure la Terre et dans la laquelle des particules peuvent rester piégées pendant des mois. Ces particules pénètrent profondément dans la matière et peuvent à la longue causer des dégâts considérables. Les éruptions les plus violentes peuvent tuer un astronaute en quelques minutes, si ce dernier ne se trouve pas à l’abri.
  3. en émettant des bulles de plasma, et notamment des Ejections Coronales de Masse (CME). Ces éjections de plasma, dont la masse peut atteindre un milliard de tonnes, sont émises régulièrement par le Soleil. Elles sont cependant dix fois plus fréquentes en période de forte activité, où il peut s'en produire plusieurs par jour. Une CME dirigée vers la Terre met un à deux jours pour l’atteindre. En heurtant la magnétosphère, elle rompt le fragile équilibre entre le champ magnétique solaire et le champ géomagnétique. Ce déséquilibre déclenche une chaîne de réactions. On parle alors d’orage magnétique, qui se manifeste par des fluctuations du champ géomagnétique. Une des conséquences en est l’accélération vers la Terre de particules issues de la magnétosphère (et non du vent solaire, comment on l’entend parfois dire). L’interaction de ces particules avec les hautes couches de l’atmosphère engendre les fameuses aurores polaires. Les orages magnétiques s’accompagnent de nombreux autres effets, dont l’intensification des courants dans l’ionosphère, à des latitudes magnétiques comprises entre 65 et 75 degrés de latitude.
  4.  

 

 Les éjections de masse coronales voyagent entre le Soleil et la Terre en environ trois jours. Pendant la quasi-totalité de cette période, aucune information n’est disponible : Les scientifiques sont comme aveugles.

Ce n’est que lorsque la perturbation arrive au niveau point de Lagrange L1 (point situé entre la Terre et le Soleil) où se trouvent plusieurs satellites, qu’on peut savoir s’il y aura impact ou non, et quantifier l’effet. La perturbation met ensuite moins d’une heure à atteindre la Terre. Il reste donc peu de temps pour prendre des mesures.

Lorsque l’éjection de masse coronale atteint le point de Lagrange L1, plusieurs satellites enregistrent diverses informations telles que la densité, la vitesse, le champ magnétique et la température. Grâce à ces informations, il est possible de prédire les perturbations qui seront engendrées et, le cas échéant, de déclencher une alerte afin de prévenir les personnes concernées.

 

Communications

Les ondes électromagnétiques émises entre le sol et les satellites de télécommunication doivent traverser l’ionosphère, un milieu ionisé qui modifie légèrement. Les gammes de fréquence les plus concernées vont de 10 MHz à 2 GHz environ. Lors d’orages magnétiques, d’éruptions solaires ou d’événements à protons, les caractéristiques de l’ionosphère changent et la transmission s’en trouve affectée. Les ondes peuvent souffrir de dispersion, être fortement voire totalement atténuées ou être réfractées, provoquant alors des interférences. Certains de ces effets peuvent être locaux (quelques kilomètres) et durer quelques minutes alors que d’autres (les évènements à protons) affectent les régions polaires pendant plusieurs heures. La plupart sont difficiles à prédire. D’autres perturbations peuvent survenir lors d’éruptions solaires, quand les ondes radio émises par le Soleil interfèrent directement avec les émissions terrestres. Des instruments comme le radiohéliographe de Nançay permettent de suivre et d’étudier ces émissions solaires.

Ces effets sont connus des opérateurs de satellites de télécommunication, qui alors se servent de satellite-relais pour transmettre les communications. Ces effets affectent davantage encore les radiocommunications de moyennes et longues distances dans la bande HF, qui est la plus affectée par les variations de l’ionosphère. Le positionnement par satellites (GPS) est lui aussi concerné. Il arrive occasionnellement que la mesure de la position soit fausse ou que le signal des satellites ne soit plus capté. Plusieurs interruptions du service GPS sont par exemple survenues lors de la guerre du Golfe, perturbant les opérations militaires. Ces dysfonctionnements constituent aujourd’hui le principal obstacle à la mise à disposition d’un service 100% opérationnel et rendent d’autant plus nécessaire l’envoi simultané d’informations pour valider la mesure de la position.

 

Réseaux électriques

La nuit du 13 mars 1989, une panne de transformateur survint dans le réseau électrique de Hydro-Québec, entraînant des dysfonctionnements qui, en moins de 90 secondes plongèrent plus de 6 millions de personnes dans l’obscurité. Cette panne dura 9 heures et le montant des dégâts fut évalué à 9 milliards de $. Cette panne, qui reste exceptionnelle, est le résultat d’un enchaînement d’évènements qui démarra par un orage magnétique qui intensifia les courants ionosphériques à haute latitude. Ces derniers engendrèrent par induction dans la croûte terrestre des courants qui vinrent s’ajouter à ceux circulant normalement dans les transformateurs. Il en résulta la surchauffe de certains transformateurs, qui étaient déjà fortement sollicités.

Image nocturne révélant une aurore polaire au-dessus de l’Europe, le 30 octobre 2003.

L’impact des orages magnétique et des courants induits est bien connu des pays situés à haute latitude (Scandinavie, Canada, États-Unis, Nouvelle-Zélande) dont les compagnies d’électricité ont depuis pris des mesures pour soulager le réseau en cas de pareil évènement. La Finlande ne semble jamais avoir connu de panne, grâce à une marge de sécurité importante sur la puissance admissible des transformateurs. En revanche, la Suède a connu plusieurs pannes. La plupart de ces pays font appel à des modèles de prévision pour alerter en cas d’orage magnétique. Ces prévisions ne sont hélas que d’un intérêt limité, car elles se basent sur des mesures prélevées dans le vent solaire, entre le Soleil et la Terre, et laissent qu’une heure de préavis.

Les mêmes courants induits peuvent affecter les oléoducs et les gazoducs, entraînant une corrosion accrue. Des dysfonctionnements ont aussi été signalés dans la signalisation des réseaux ferroviaires. Ces effets sont les plus prononcés dans la zone dite aurorale, située entre 65 et 75° de latitude magnétique. Or comme le pôle magnétique est décalé de 11° environ du pôle géographique, la Sibérie est relativement peu affectée, alors que le nord des États-Unis l’est davantage, à latitude géographique égale. Lors de forts orages magnétiques, ces effets peuvent se ressentir jusqu’à plus basse latitude. L’image de droite montre une aurore polaire observée la nuit du 30 octobre 2003 par le satellite militaire DMSP. Cette aurore fut observée jusqu’en Belgique, en Allemagne et en Pologne, et engendra de forts courants induits jusque dans le sud de la Scandinavie. Aujourd’hui, avec la forte interconnexion des réseaux électriques européens, le dysfonctionnement d’une partie du réseau n’est plus un problème régional, mais peut affecter plusieurs pays.

 

Climat

Le Soleil est la principale source d’énergie de notre planète et il est dès lors normal de chercher des causes solaires aux variations climatiques. De nombreuses études scientifiques ont montré que lors des deux derniers millénaires, les périodes de faible activité solaire (absence de taches solaires) ont coïncidé avec un refroidissement général du globe. Un des plus marqués sur le minimum de Maunder entre 1645 et 1715, aussi connu sous le petit âge glaciaire. Plusieurs études ont aussi signalé une recrudescence de l’activité solaire au cours du vingtième siècle, avec notamment une augmentation du champ magnétique, dont les conséquences sur Terre sont pour l’instant mal connues.

 À ce propos, des phénomènes lumineux éphémères très brefs ont été observés dès 1990 au-dessus de zones orageuses. Il s’agit notamment de décharges électriques, qui pourraient servir de relais entre la basse ionosphère et la stratosphère, et ainsi rendre compte des échanges d’énergie entre ces deux milieux. Le futur microsatellite Taranis du CNES sera dédié à l’étude de ces phénomènes.

 

 

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